Après leur abandon, plusieurs objets subissent une dégradation selon le climat, les types de sol, le contexte et les conditions d’enfouissement (vitesse, proximité d’autres matériaux, compactage, lessivage, etc.). Pour certains matériaux, cette dégradation est rapide et entraîne inéluctablement leur perte, alors que pour d’autres, elle va parfois ralentir et même s’arrêter. On dit alors que l’objet est entré en équilibre avec son environnement.
La fouille rompt cet équilibre et provoque une reprise de la détérioration des objets, qui doivent s’acclimater à de nouvelles conditions environnementales. Il est possible de diminuer cette détérioration par l’adoption de mesures de conservation appropriées, qui peuvent se résumer tout simplement à conserver sec ce qui est sec et mouillé ce qui est mouillé.
Certaines interventions sont à la portée de l’équipe d’archéologues, ce qui explique pourquoi la présence d’un restaurateur sur le terrain n’est pas toujours essentielle. Toutefois, lorsqu’il faut procéder à une consolidation pour le prélèvement d’un objet fragile ou la préservation in situ d’éléments fugaces ou instables, c’est le restaurateur qui doit intervenir.
Figure 3 : Un restaurateur à l’œuvre au site archéologique Cartier-Roberval. Des résines synthétiques sont utilisées pour consolider une pièce de bois en vue de son prélèvement.
Photographie : Blandine Daux, Centre de conservation du Québec.
Ce qui est optionnel pour les sites terrestres devient incontournable dans le cas des sites marins ou subaquatiques. Dans un tel contexte, une fouille effectuée sans conservation équivaut à du vandalisme et tous les matériaux doivent recevoir un traitement pouvant parfois s'échelonner sur plusieurs années.
En milieu marin, il est admis qu'un mois de fouille intensive nécessite une année de traitement de conservation en atelier. Cette estimation doit cependant être considérée comme un minimum qui, dans certains cas, peut être doublé, voire triplé.
Les découvertes provenant d’un contexte subaquatique nécessitent des mesures de conservation dès leur mise au jour, ainsi que la participation d’un restaurateur au projet archéologique. Comme c’est l’eau qui a permis la préservation des matériaux organiques tels que le bois et le cuir, la retirer sans traitement risque d’altérer la structure des objets de façon irréversible. Une telle altération compromet grandement l’intégrité et l’intérêt de ceux-ci aux fins d’étude, ainsi que leur potentiel pour une éventuelle mise en valeur. Les sites marins compliquent la situation en contaminant tous les matériaux avec des sels, qu’il faudra extraire à l’aide de traitements de longue durée.
Les sites marins sont parfois favorables au développement de concrétions possédant la dureté du béton et qui renferment un amalgame d’objets et de matériaux très différents. Patiemment, jour après jour, la fouille fine effectuée en atelier par un restaurateur permet d’extraire de ces masses souvent informes, des artéfacts parfois impossibles à déceler depuis leur surface. Ici, ce sont la radiographie et, parfois, la tomographie, qui viennent à la rescousse du restaurateur, en révélant une partie de la structure des objets emprisonnés. La fouille fine de ces concrétions par un restaurateur implique une certaine délégation de l’intervention archéologique, car l’archéologue n’est pas outillé pour effectuer à la fois la fouille et la préservation des objets piégés à l’intérieur.
Il est possible que la fouille d’un site permette la découverte de structures d’habitation ou de vestiges architecturaux qu’il faut préserver à long terme en raison de leur intérêt patrimonial. Compte tenu des conditions climatiques propres au Québec, avec ses épisodes de gel et de dégel à répétition, il n’est habituellement pas possible de préserver de tels vestiges in situ sans des moyens complexes et des abris construits sur mesure. Pour favoriser une préservation à long terme et à défaut de construire une structure de protection permanente, la seule option possible consiste à réenfouir les vestiges.
Figure 4-A : Vue d’une concrétion marine provenant de l’épave du Elizabeth and Mary. À première vue, rien de particulier ne ressort d’un premier examen visuel. Toutefois, un objet fragile est emprisonné dans une matière aussi dure que du béton. Collections du Laboratoire et Réserve d'archéologie du Québec/MCC.
Photographie : Jean Blanchet, Centre de conservation du Québec.
Figure 4-B : Un examen aux rayons X révèle l’image d’un objet circulaire qui se superpose à l’image d’un grand clou.
Radiographie : Michel Élie, Centre de conservation du Québec.
Figure 4-C : Après un premier dégagement de la concrétion, l’objet circulaire, une broche en argent, commence à se révéler.
Photographie : Jean Blanchet, Centre de conservation du Québec
Figure 4-D : Une vue de la broche après traitement.
Photographie : Jean Blanchet, Centre de conservation du Québec.
Figure 5 : La fouille fine d’une concrétion. Un équipement spécialisé permet de procéder de façon sécuritaire à la fouille des concrétions marines.
Photographie : Michel Élie, Centre de conservation du Québec.
Date de mise à jour : 09 avril 2018