Boîte lumineuse (14 boîtes) avec photographies couleur de Roberto Pellegrinuzzi (1992), installée dans l'Hôpital de l'Archipel aux Iles de la Madeleine.
Photo 1 : CCQ, Nathalie Dion
Comme œuvres d'art ou éléments intégrés à des œuvres d'art, les boîtes lumineuses présentent plusieurs formes et sont faites d'une variété de matériaux laissant passer la lumière.
Il sera question ici, de la conception, de la réalisation et de l'entretien des boîtes lumineuses qui comportent des images réalisées par des procédés photographiques ou des impressions numériques couleur sur pellicule plastique.
Pour de l'information sur les techniques d'impression, sur les matériaux à utiliser et sur leur stabilité, voir des sites ou des textes spécialisés. (Voir Bibliographie, WILHEIM)
Le problème le plus fréquent, avec les boîtes lumineuses, est celui de la dégradation des teintures des photographies ou des impressions numériques qu'elles contiennent. Il s'agit souvent d'images sur pellicule transparente disponibles sur le marché qui sont, en effet, instables et qui perdent graduellement leurs couleurs.
Le processus inéluctable de dégradation de ces images peut toutefois être ralenti et, du même coup, la durée de vie des œuvres peut être augmentée. Il suffit d'adopter de bonnes mesures de conservation dès la conception et l'installation.
Facteurs de dégradation
Action de la chaleur
Une chaleur trop élevée assèche les matériaux organiques et accélère leur vieillissement. La chaleur qui se développe à l'intérieur des boîtes lumineuses constitue un facteur majeur de dégradation des couleurs sur pellicule transparente. Une température et un taux d'humidité élevés contribuent, en effet, à accélérer la dégradation des colorants.
Les changements quotidiens susceptibles de se produire dans les cycles de température peuvent aussi provoquer une déformation et une dégradation du subjectile (support plastique).
Action de la lumière
Pour certains caissons, les couches colorées dans les caissons lumineux risquent d'être altérées par les rayons ultraviolets (UV) et par une lumière intense.
Selon les experts, il existe une relation proportionnelle directe entre la quantité de lumière que reçoit l'œuvre et la dégradation de ses couleurs. Par exemple, si l'on diminue de 50 % la quantité de lumière, on accroît d'autant la durée de vie de l'œuvre.
Action des polluants
Les polluants et les micro-organismes peuvent réduire la permanence des images, comme en fait foi une étude (voir MEYER et BERMAN dans la bibliographie) sur la stabilité et la permanence des images Cibachrome, maintenant appelées Ilfochrome et considérées comme très stables.
Pour augmenter la longévité des images dans des boîtes lumineuses
Maintenir une température stable à l'intérieur de chaque caisson
S'assurer d'une ventilation adéquate dans le caisson pour évacuer la chaleur et diminuer l'amplitude des cycles de température :
Aménager des trous dans le haut et dans le bas du caisson pour créer un circuit d'échange d'air naturel avec l'extérieur. Prévoir un nombre suffisant de trous en fonction des dimensions de la boîte. Aménager de petites grilles devant les trous pour filtrer les poussières
Si la boîte est fixée au mur, s'assurer qu'il y a suffisamment d'espace entre les deux
Choisir un bon éclairage :
Les fluorescents (le TL950 de Philips est recommandé) sont un bon choix parce qu'ils dégagent peu de chaleur. Ce sont plutôt les ballasts qui en dégagent. Il est donc conseillé de les placer en dehors des caissons. Il existe aussi des ballasts électroniques, de petit format, qui dégagent moins de chaleur. Ceux-ci sont à privilégier. La nouvelle génération de fluorescents qui utilisent moins d'électricité est également à explorer
Les ampoules à diodes électroluminescentes (DEL) sont aussi un bon choix parce qu'elles sont très durables, économiques sur le plan de l'énergie et qu'elles produisent très peu de chaleur
Limiter le temps d'exposition des photos à la lumière :
Les lumières ne devraient pas être allumées plus d'une douzaine d'heures par jour. Une boîte lumineuse n'a pas à rester éclairée quand le site n'est plus fréquenté ou accessible
Il est recommandé d'intégrer une minuterie au circuit qui contrôle l'éclairage
Éviter ou minimiser l'exposition directe des images à la lumière naturelle ou à toute autre source lumineuse :
Contrôler la lumière naturelle qui éclaire l'œuvre directement pour la protéger des ultraviolets, de la chaleur et d'un niveau d'éclairement trop élevé (mesure en lux), par exemple avec des stores, des rideaux ou des filtres solaires sur les vitres. L'utilisation de verre laminé sous vide ou de pellicule anti-UV peut aussi être efficace pour certains caissons
Minimiser l'exposition directe des photos à d'autres sources d'éclairage, tels les spots. Ceux-ci dégagent plus de chaleur localement et risquent de mater les zones colorées
Assurer une protection contre les rayons ultraviolets :
Choisir des feuilles plastiques appropriées pour le laminage des photos. Il peut s'agir de feuilles acryliques blanchâtres qui coupent les ultraviolets provenant de l'arrière ou du dessus comme dans le cas des puits de lumière, ou de feuilles avec filtre à ultraviolets intégré
Protéger les pellicules de scellage recouvrant l'image contre l'humidité :
Choisir, pour l'œuvre, un lieu éloigné de sources d'humidité comme les fontaines. Ne pas la placer près des murs extérieurs, où se forme de la condensation par temps froid. La condensation peut provoquer la formation de moisissures
Empêcher l'humidité de pénétrer entre les feuilles et l'image sur pellicule plastique en optimisant les conditions de montage des pellicules. Pour ce faire, bien choisir les feuilles de plastique pour le montage et la méthode de scellage de leurs bords. S'informer sur les méthodes de scellage avant de faire le montage.
Utiliser le polyester comme pellicule plastique, pour sa stabilité.
Il importe de faire un examen périodique de tous les éléments constituant la boîte lumineuse pour en vérifier l'état. Au cours de cet examen, les points suivants sont à surveiller :
le fonctionnement de l'éclairage
la qualité de l'image (matité et rendu des couleurs)
l'état des subjectiles (déformation du support plastique, fentes)
l'état du verre de protection (craquelures, bris, graffitis)
l'état des autres éléments comme, par exemple, le métal.
Il est admis qu'il faut changer l'impression quand l'image originale au cœur de l'œuvre est altérée de façon significative.
Les conditions de production, d'exposition et de conservation des photos sur pellicule transparente variant d'une œuvre à l'autre, on ne peut déterminer leur vitesse de dégradation ou leur durée de vie.
Étant donné les conditions habituelles d'exposition de l'art public, on peut toutefois prévoir remplacer les photos à des intervalles de 4 à 8 ans.
Procédures de remplacement
Les images sur pellicules plastiques insérées dans des boîtes lumineuses ont besoin d'être remplacées régulièrement. Une procédure de remplacement simple et sans risque doit être établie dès la conception de la boîte lumineuse.
Cette procédure doit être déterminée avec l'artiste et le propriétaire de l'œuvre. Si le propriétaire fait lui-même tirer des reproductions, il lui est conseillé de le faire avec l'approbation de l'artiste ou de son mandataire, afin de respecter son intention originale et la fidélité de l'image.
Le remplacement périodique des pellicules plastiques d'œuvre doit être prévu dans le devis d'entretien de l'œuvre, comme l'entretien de ses autres composantes. Un montant d'argent doit aussi être réservé à cet effet dans le budget global d'entretien de l'œuvre.
L'endroit où sont conservés les originaux, qu'il s'agisse de fichiers numériques ou de négatifs originaux, doit aussi être précisé dans le devis d'entretien (voir l'encadré qui suit).
Idéalement, c'est à l'artiste de les conserver et de les faire réimprimer au besoin.
Il existe une autre façon de prévoir le remplacement de l'image dans le caisson, laquelle consiste à produire une seconde image sur pellicule transparente et à la conserver au frais et au sec dans un tiroir à plat ou enroulée, côté face à l'extérieur. Cela doit se faire sous des conditions précises :
le taux d'humidité ne doit pas dépasser 40 %
les œuvres sur polyester devraient être enroulées
les subjectiles et les encres choisis doivent être reconnus pour leur stabilité dans l'obscurité
la conservation de la copie maîtresse Copie magnétique audio ou vidéo comprenant le contenu intégral du montage dans sa forme finale de laquelle seront tirées des copies destinées à la diffusion. Cette copie doit être conservée dans les meilleures conditions possibles. On dit aussi « bande étalon », « bande mère », « copie originale » et « master ». Le terme souche est recommandé officiellement en France. (Dictionnaire des arts médiatiques, GRAM)copie maîtresse (le négatif ou le fichier numérique) reste nécessaire
la qualité de la copie conservée doit être comparée au négatif ou au fichier numérique avant d'être utilisée, afin d'y découvrir les possibles altérations
un système de gestion de la recopie des CD et DVD doit être organisé, de telle sorte que ces supports soient recopiés à tous les 4 ans au maximum.
Pour bien conserver la copie maîtresse
Si l'original est un négatif :
faire un internégatif par mesure de sécurité. Garder les deux à des endroits différents. Le négatif peut aussi être numérisé
l'original doit être conservé loin de la chaleur et à l'obscurité, dans une enveloppe pour photos en polyéthylène. Celle-ci doit être insérée dans un cartable ou une enveloppe sans acide, à l'intérieur d'une boîte sans acide
idéalement, l'artiste peut conserver le négatif ou le positif dans un congélateur. L'enveloppe de Mylar® ?ou de papier sans acide qui le contient doit alors être placée dans une seconde enveloppe de polyéthylène laminée d'aluminium, comme les enveloppes en Marvelseal®
pour contrer l'humidité excessive et la condensation au moment de sortir l'original du congélateur, attendre au moins 4 heures avant d'ouvrir l'enveloppe. La température interne de l'enveloppe aura ainsi eu le temps de s'équilibrer avec celle de l'extérieur
il est important de retirer l'air des enveloppes avant de les fermer. L'air peut être aspiré à l'aide d'une paille. Des ensembles spéciaux sont aussi en vente chez Metal Edge Inc. Il s'agit des Safe Care® Image Archive Freezer Kits
sur l'enveloppe, apposer une étiquette présentant une description du procédé et des matériaux utilisés pour la production de l'image et son enregistrement.
Pour la conservation de l'image numérique enregistrée sur CD ou tout autre support, voici quelques mesures à observer :
enregistrer le fichier numérique de l'image sur au moins 2 supports différents (2 technologies différentes), comme le disque dur et un CD ou DVD de très bonne qualité (or ou argent). Faire une seconde copie en cas de sinistre. Garder les 2 à des endroits différents. Pour en savoir plus, consulter Critères de choix d'un disque optique, guide d'entretien et de manipulation dans les Capsules archivistiques du CCQ
faire migrer le fichier numérique vers de nouveaux systèmes d'exploitation et supports lorsque ceux-ci deviennent obsolètes. Le faire avant que la technologie de lecture cesse d'être accessible. Exercer une veille technologique pour la migration des données, lors des sauts évolutifs technologiques
conserver les CD à la verticale. Pour plus d'information, consulter le Guide de manipulation et d'entretien dans les capsules archivistiques du CCQ
choisir un format numérique de conservation sans compression, comme TIFF
au moment de l'enregistrement du document, s'assurer d'indiquer le plus de métadonnées possible
inclure, sur le même support numérique, un dossier texte décrivant le procédé et les matériaux utilisés pour la production de l'image et son enregistrement pour qu'elle soit toujours accessible, ou inclure ce court texte dans les métadonnées du fichier numérique de l'image.