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Le soin des textiles

Lalonger, Louise, 1995 (Révison 2011). Conservation préventive dans les musées. Manuel d'accompagnement, pages 145 à 152.

Les collections de textiles des musées sont très variées. Elles se composent de textiles plats tels que les tapisseries, les drapeaux et les dentelles ou de textiles en volume comme les costumes. Elles incluent également des objets composites comme les poupées habillées, les meubles tapissés et les accessoires vestimentaires.

Les fibres textiles sont parmi les matériaux organiques les plus fragiles de par leur nature, leur forme et l'usage qu'on en fait. Les textiles ont été affaiblis par un usage répété et un entretien domestique régulier. Dans les collections, ils constituent des objets particulièrement vulnérables aux manipulations et à l'ensemble des agents de dégradation.

On prévient leur détérioration par une mise en réserve adéquate et un bon contrôle du milieu ambiant. La lumière, l'humidité, les moisissures et les insectes sont les principaux agents de détérioration.

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Les principales causes de détérioration

La lumière

L'effet de la lumière et des rayons ultraviolets est cumulatif et irréversible. La lumière pâlit le tissu et affaiblit ses fibres. À cet égard, la soie est la plus vulnérable. Toutefois, c'est l'altération des couleurs qui est sans doute la plus visible et qui indique un problème de dégradation.

Il y a trois conditions importantes à respecter pour atténuer l'effet de la lumière.

  • En exposition, abaissez l'intensité lumineuse à 50 lux et dans les réserves, maintenez les textiles dans l'obscurité totale.
  • Assurez-vous que le rayonnement ultraviolet est inférieur à 75 microwatts par lumen.
  • Limitez l'exposition des textiles à six mois par période de cinq ans.

Ces mesures semblent strictes, mais elles sont essentielles à la conservation de l'objet. Des appareils mesurent l'intensité lumineuse et des filtres réduisent les rayons ultraviolets.

L'humidité

Le contrôle de l'humidité relative est important pour une collection de textiles. L'humidité excessive et la sécheresse extrême sont à surveiller attentivement. Un taux d'humidité relative inférieur à 20% entraîne le dessèchement et l'affaiblissement des fibres. Par contre, lorsque l'humidité relative est trop élevée, les éléments décoratifs en métal et les clous qui retiennent un textile risquent de se corroder et de tacher le tissu. De même, cette humidité élevée peut provoquer une migration des couleurs instables.

Les moisissures

Les spores des moisissures sont en suspension dans l'air. Leur développement est favorisé dans un milieu combinant une humidité relative supérieure à 65%, une température élevée et de l'air stagnant. Les micro-organismes laissent des taches, brisent les fibres et parfois même les détériorent complètement.

Les fibres végétales dites cellulosiques comme le coton, le lin et le chanvre sont plus vulnérables aux micro-organismes, quoique certains se développent spécifiquement sur les fibres animales dites protéiques, comme la laine et la soie.

Lorsque des moisissures sont détectées, cherchez à en identifier les causses et n'hésitez pas à consulter un restaurateur. Celui-ci pourra décider de la pertinence d'utiliser un fongicide ou de nettoyer le textile. Transférez immédiatement les textiles dans un endroit sec.

Peu importe la nature des fibres, l'amidon, les apprêts ou la saleté favorisent les micro-organismes et l'attaque par les insectes. Afin de prévenir ces types d'infestation, il est important d'examiner et de dépoussiérer les nouvelles acquisitions dès leur arrivée au musée et de les mettre en quarantaine au besoin. Il faut faire des inspections régulières et maintenir les lieux propres et bien ventilés.

Les insectes

Les insectes peuvent aussi faire des dommages irréparables, notamment les mites et l'attagène des tapis. Seules les larves causent des dégâts mais les adultes volent et propagent l'infestation. Les lainages, fourrures, plumes et piquants de porc-épic sont des nourritures de prédilection pour certaines larves. Les tissus souillés constituent toujours de meilleurs appâts que les tissus propres.

En cas d'infestation, il est important d'identifier l'insecte afin de savoir à quelle matière il est susceptible de s'attaquer. Évitez les insecticides qui peuvent endommager les textiles et être très toxiques pour les humains. Il est important qu'on isole les textiles infestés immédiatement. Les infestations peuvent être contrôlées par un programme intégré de lutte contre les insectes.

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Les mesures préventives dans la réserve

Le pH neutre des matériaux

L'alcalinité ou l'acidité peuvent provenir de l'atmosphère mais surtout des matériaux d'emballage qui sont directement en contact avec les objets. On s'assure que ces matériaux sont des produits inertes et à pH neutre. Les fibres textiles sont vulnérables à l'acidité provenant du bois, du carton ou du papier journal par exemple qui fait jaunir les tissus. Les fibres animales sont vulnérables à l'alcalinité provenant des produits sans acide avec réserve alcaline. C'est pourquoi on utilise uniquement des produits sans acide et sans réserve alcaline (P0143) pour envelopper la laine et la soie.

Le constat d'état

Avant d'être mis en réserve, chaque textile doit faire l'objet d'un constat d'état qui permet de noter son état, d'identifier les fibres et les matériaux qui le composent. La mise en réserve tient compte du type d'objet, de son état et des facteurs environnementaux.

Le dépoussiérage

Après cette inspection minutieuse, les textiles sont dépoussiérés. On passe l'aspirateur sur les deux faces de l'objet. Attention aux éléments décoratifs comme les boutons ou les perles de verre qui peuvent se détacher. Dans ce cas, on prend soin d'apposer un écran de moustiquaire de nylon pour créer une barrière. On utilise l'embout effilé de l'aspirateur recouvert d'un filtre pour les endroits difficiles d'accès. On peut également dégager la poussière avec un pinceau à poils souples (P0267) en le dirigeant vers l'embout de l'aspirateur. L'usage d'accessoires pour le dépoussiérage d'ordinateurs (P0284) et d'un régulateur de courant, permet une aspiration minutieuse, directement sur le textile. Pour les textiles trop délicats, consultez un restaurateur.

Si le technicien du musée peut dépoussiérer un textile, il ne doit jamais le laver. Cette opération délicate et spécialisée est réservée au restaurateur, compte tenu de l'instabilité des couleurs, de la fragilité des fibres et de la possibilité de déformation.

La pose du numéro d'acquisition

Pour appliquer un numéro d'acquisition, il existe une méthode simple qui n'altère pas l'objet. On utilise un non-tissé de type Reemay® (P0085), Cerex® (P0025) ou Tyvek® (P0096) sur lequel on indique le numéro avec des crayons feutre permanents et indélébiles (P0110, P0111, P0241). Si on possède une machine à écrire, on peut dactylographier le numéro directement sur le non-tissé. . Ce numéro est découpé et cousu à la main. Quelques points suffisent à le maintenir en place. On commence et on termine l'aiguillée par quelques points arrière plutôt que de faire des nœuds. Il est important de coudre les numéros toujours au même endroit, de façon discrète mais facilement repérable.

Le rangement à plat des textiles

En général, il est préférable de ranger les textiles à plat. On utilise des tiroirs à plans, des boîtes de plastique ou de carton sans acide. Le but est d'éliminer les tensions, de protéger les textiles de la poussière, de la lumière et des manipulations. Les costumes trop délicats pour être suspendus sont rangés dans des boîtes en carton sans acide. Rembourrez le vêtement pour bien le supporter et éviter la formation de crêtes.

Faute de boîtes en carton sans acide, utilisez des grandes boîtes de fleuristes dont vous aurez tapissé le fond et les côtés d'une pellicule de Mylar® (P0066) ou de polyéthylène. Il existe également des boîtes de différents formats, faites de plastique stable, que l'on trouve facilement dans le commerce et à peu de frais, comme les contenants Rubbermaid® (P0306).

Pour envelopper et rembourrer les vêtements, utilisez du papier de soie sans acide ou du tissu de coton écru (P0093) prélavé qui ne contient ni colorant, ni produit de blanchiment. Il faut se débarrasser des produits inadéquats, tels les papiers et les cartons acides, le papier journal, les papiers de soie de couleur et les remplacer par des matériaux neutres pour la mise en réserve.

L'enroulement des textiles plats

Les textiles plats de grands formats sont enroulés. On utilise des rouleaux de carton (P0280) de diamètre proportionné à l'épaisseur et au format du textile. Les tubes provenant de commerces de tapis servent pour des textiles plus minces, alors que les tubes pour coffrage de béton (Sonotube® P0320), offerts dans divers diamètres, supportent des textiles épais comme les tapis, les tapisseries et les courtepointes. Les rouleaux d'essuie-tout conviennent aux textiles plus étroits comme les métrages de dentelle.

Une pellicule isolante de Mylar® empêche la migration de l'acidité du carton vers le textile. Le tube est ensuite recouvert d'un papier de soie sans acide ou d'un jersey (P0064) de coton prélavé. Le textile est déposé sur un morceau de papier sans acide ou du coton écru qui, une fois roulé, couvrira toute la surface.

Afin de faciliter le travail, les textiles de grand format sont enroulés par deux personnes, chacune d'elles se plaçant à une extrémité du tube. Lors de l'enroulement, on lisse le textile avec les mains pour s'assurer qu'il ne se forme pas de faux plis.

Les textiles sont enroulés le recto contre le tube, mais s'il s'agit de textiles épais ou à relief (tels les velours, les tapis, les textiles bouclés), on les enroule le verso contre le tube. On recouvre le tout d'une housse de coton écru fermée par des galons de coton. Cela protège le textile contre la lumière et la poussière.

Ce système d'enroulement assure une protection au textile mais ne permet pas de le voir. Il faut donc que l'objet soit identifié par une étiquette pouvant contenir une photographie. Cette précaution permet la consultation rapide et évite des manipulations. Chaque rouleau doit avoir un support individuel afin d'éviter l'empilement. Il existe des systèmes de rangement sur rail. Pour de raisons d'économie, on peut utiliser des supports métalliques ou des chaînes avec crochets.

Le rangement des costumes

Lorsque des vêtements sont dans un bon état de conservation et qu'ils peuvent supporter leur poids, on peut les suspendre sur des cintres (P0394) matelassés. Les cintres sont en bois vernis ou en plastique et de différents formats adaptés à la forme des vêtements. Les cintres de métal sont à proscrire, car ils n'assurent pas un support adéquat et peuvent tacher les vêtements.

Le matelassage des cintres se fait avec de la bourre de polyester (P0108) ou de l'ouate de coton. Le tout est recouvert d'une housse de coton écru. Si la forme du cintre n'épouse pas suffisamment celle du vêtement, on peut rembourrer localement à l'aide de papier de soie sans acide.

Certains vêtements plus lourds ou encombrants peuvent demander un soutien supplémentaire pour qu'ils ne glissent pas du cintre. On peut coudre des galons de coton, là où il y a des coutures plus solides, à la taille par exemple, et les retenir au crochet du cintre.

Pour protéger de la poussière, de la lumière et des manipulations, les costumes sont recouverts d'une housse de coton écru. Ces housses sont simples à fabriquer et le coton permet une bonne aération, contrairement aux housses en plastique qui retiennent l'humidité. On regroupe les vêtements dans une armoire ou dans un espace fermé par des rideaux.

Le soin porté aux accessoires

Les accessoires de costumes tels que les chaussures, les chapeaux, les sacs à main, les colliers, demandent un rangement à plat. On les protège de la poussière et de la lumière en les couvrant de papier de soie sans acide, puis en les déposant, selon le cas, dans des tiroirs ou dans des boîtes, sur des étagères fermées par des portes ou des rideaux.

Certains accessoires doivent être rembourrés et supportés pour conserver leur forme originale. Les chapeaux sont placés sur des formes de modiste ou des cônes en mousse de polystyrène taillés sur mesure et recouverts de papier de soie sans acide ou de jersey de coton prélavé. Parfois, on recrée la forme en n'utilisant que du papier sans acide chiffonné. On n'oublie pas de bien soutenir les bords des chapeaux.

On évite d'ouvrir et de refermer inutilement les fermoirs de sac à main, les ombrelles et les éventails. Ces derniers demandent une attention particulière lors de la mise en réserve. On les déploie délicatement en prenant garde de ne pas forcer les branches. On les dépose sur un support rigide et inerte comme du carton sans acide ou un panneau en mousse de polyéthylène. Ceci permet de les déplacer sans les toucher.

Les fils des colliers risquent de se rompre et les perles de s'éparpiller. On dépose chaque collier dans une boîte, ce qui permet de le déplacer sans risque. Les chaussures sont identifiées individuellement, bourrées et rangées par paires. On les isole pour éviter l'abrasion, les transferts de couleurs et les problèmes d'adhésion des surfaces collantes comme celles des cuirs synthétiques. Les parapluies et parasols, lorsque leur état le permet, sont rangés entrouverts et verticalement.

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Les mesures préventives en exposition

Quoique plusieurs méthodes permettent d'exposer un textile en toute sécurité, assurez-vous que celle retenue convient à l'état de conservation du textile. En exposition, on respecte les normes d'éclairage. On éteint à la fermeture et lorsqu'il n'y a pas de visiteurs. Le contrôle peut s'exercer à l'aide d'une minuterie ou d'un détecteur de présence. Les textiles plus sensibles peuvent disposer d'un éclairage à commande manuelle.

La manipulation adéquate des textiles est sans doute la mesure la plus importante pour prévenir les dommages. On s'assure qu'il n'y a pas d'objets qui puissent accrocher le textile comme les bijoux personnels, les crayons ou les ciseaux. Lors du montage, une planification des déplacements des textiles évite les manipulations inutiles. On s'assure que les textiles sont bien soutenus et exempts de toute tension.

Les vitrines et les supports de présentation doivent être propres et déjà prêts à les recevoir. Les supports sont conçus sur mesure en fonction de la forme de l'objet et fabriqués avec des matériaux inertes. Leur conception se fait en collaboration avec le designer, le conservateur et le restaurateur.

Il ne faut jamais agrafer ni clouer un textile. On l'installe sur un support rigide recouvert de tissu. Si on le dispose sur un plan légèrement incliné, on s'assure qu'il ne glisse pas. Pour l'accrochage des textiles plus lourds, il est possible de coudre un velcro (P0167) dans la partie supérieure, ce qui permet de répartir les tensions. (Notes de l'ICC, n° 13/4)

Pour présenter les costumes anciens, les mannequins commerciaux ne conviennent pas toujours car leurs dimensions sont souvent inadaptées. Il est difficile d'y installer les costumes sans danger.

Toutefois, il existe sur le marché des mannequins fabriqués spécifiquement aux dimensions des costumes historiques. À défaut, il est toujours possible de réaliser des supports qui épousent et soutiennent le vêtement. Utilisez des matériaux stables comme les mousses de polyéthylène (Ethafoam P0325), les bourres de polyester et le jersey de coton.

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En résumé

On ne pourra jamais arrêter le vieillissement des textiles. Cependant, une bonne connaissance des matériaux, alliée à des manipulations adéquates et à un contrôle de la lumière et du climat, permet d'en ralentir le processus.

Bibliographie et vidéographie

Date de mise à jour : 16 juin 2016

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