Hommage à René Lévesque (1988) de Robert Roussil. uvre en béton coulé, moulé et armé avec un éclairage intégré, situé au Musée plein air de Lachine.
Exposée à la pointe d'une péninsule s'avançant dans le fleuve Saint-Laurent, cette oeuvre affronte les rigueurs du climat québécois depuis quelques
décennies déjà.
Photo 1 : CCQ, France Rémillard
Très utilisé par les architectes et les ingénieurs civils, le béton est le matériau de construction le plus répandu au monde. Il est souvent le matériau principal en art public. En plus des socles, on en fait des sculptures, des fontaines, des appliques murales, des imitations de pierre ou du mobilier.
Dur et résistant, le béton n'est toutefois pas à l'épreuve du temps. Certaines conditions accélèrent sa détérioration. Il faut donc identifier ses faiblesses, qui peuvent être dues à l'environnement, mais aussi découler des étapes de conception ou de réalisation.
Il faut donc tenir compte des caractéristiques du béton dès la conception d'une œuvre ou d'un support à réaliser avec ce matériau.
Pour fabriquer du béton, il faut de l'eau, du ciment et des granulats, soit du sable et des cailloux. L'eau et les ingrédients secs forment une pâte plus ou moins visqueuse qui peut être coulée dans un moule. Le ciment enrobant les granulats durcit et la pâte devient une masse dure et compacte.
Des adjuvants sont souvent incorporés au béton. Ils en améliorent les qualités en fonction de besoins spécifiques :
Le béton est habituellement coulé. Il est souvent renforcé d'armatures non visibles à la surface. La présence des armatures a pour effet de contrer les faiblesses structurales du béton : elle compense la faible résistance du matériau en tension et aux cisaillements.
Pour la même raison, certains artistes ont recours au béton fibré. Il s'agit d'une préparation additionnée de fibres métalliques ou synthétiques, de nylon ou de polypropylène, qui sert à renforcer de petits éléments en saillie.
La consistance du béton destiné à la coulée est celle d'une pâte visqueuse. La coulée se fait en continu, d'un seul jet. Dès son incorporation aux ingrédients secs, l'eau active la prise du ciment, qui formera la masse dure et compacte souhaitée.
Pour la création de sa sculpture dont les agrégats sont exposés,
cet artiste a exploité la différence de taille de ceux-ci pour différencier
les parties de son œuvre.
Détail d'une sculpture aux agrégats exposés.
Photo 2 : CCQ, Isabelle Paradis
La période de durcissement du béton se poursuit pendant plusieurs semaines, durant lesquelles il atteint sa force optimale. Le durcissement est affecté par la température. Le gel peut empêcher la prise du béton et la chaleur l'accélérer, ce qui peut causer un rétrécissement et des fissures.
Peu après la mise en œuvre, certains artistes optent pour des traitements mécaniques ou chimiques pour modifier la texture du béton ou en exposer les agrégats. On trouve donc des œuvres sablées, brossées, bouchardées, éclatées, polies ou traitées à l'acide.
Les artistes ont parfois recours à des éléments de béton préfabriqués dans la création de leurs œuvres. Il s'agit, par exemple, de :
Assemblés au moyen d'un mortier, tous ces éléments sont très solides et très fiables.
Il existe également des œuvres constituées de béton modifié aux résines, aussi appelé béton polymère. Il y a deux façons d'obtenir ce type de béton :
Il en résulte des bétons exceptionnellement forts, tout à fait imperméables et qui peuvent être colorés suivant les besoins. Des teintures aux couleurs vibrantes peuvent alors être incorporées à la résine.
Certains artistes ont recours à du béton modifié aux résines,
également appelé béton polymère. Il en résulte des œuvres
exceptionnellement costaudes, tout à fait imperméables
et qui peuvent être colorées suivant les besoins.
Des teintures aux couleurs vibrantes peuvent
alors être incorporées à la résine. C'est le
matériau sélectionné pour cette sculpture-banc.
uvre en béton modifié aux résines de Patrick Gauthier (1988), à
la station Édouard-Montpetit du métro de Montréal.
Photo 3 : CCQ, France Rémillard
Parce que le béton imite bien la pierre, on le retrouve également sous forme d'éléments sculptés ou d'ornements architecturaux. Ces œuvres, dites de fausse pierre ou de pierre artificielle, sont souvent difficiles à différencier des ouvrages réalisés avec la pierre.
Ces œuvres de fausse pierre sont des moulages constitués de béton Coignet, aussi appelé pierre moulée. Deux types de ciment peuvent être utilisés dans le béton Coignet :
À l'intérieur, les œuvres en béton présentent une stabilité exceptionnelle. À l'extérieur, les bétons anciens sont sensibles au gel-dégel, mais pas les nouveaux bétons. Ils ont une plus grande durée de vie grâce à leur formulation améliorée et à des techniques de mise en œuvre plus efficaces.
Certains bétons anciens sont peu résistants aux cycles de gel-dégel.
C'est probablement le cas de ce socle.
Détail du socle d'une œuvre de 1947 qui montre plusieurs symptômes de
dégradation : faïençage, éclatement, formation de fentes et de fissures.
Photo 4 : CCQ, Isabelle Paradis
Quelques facteurs doivent cependant être considérés pour assurer la durée de vie prévue du béton et réduire l'entretien qu'il requiert. Ces facteurs sont encore plus importants si l'œuvre est conçue pour l'extérieur. Ils doivent intervenir dès la conception, la réalisation et l'installation de l'œuvre.
La qualité des ingrédients est toujours un élément clé dans la fabrication du béton, surtout pour les œuvres conçues pour l'extérieur. Les résultats seront désastreux si :
Nid de cailloux : défaut apparent du béton présentant une zone d'agrégats non enrobée par le liant
substance liquide qui permet à l'artiste d'utiliser ses couleurs (huile, résine acrylique, colle, etc.).liant .
Ce défaut est attribuable à un dosage insuffisant du ciment, à un manque de malaxage ou de
vibrage (opération de vibration du béton avant la prise pour le rendre homogène) ou à une
fuite dans le moule lors de la coulée.
Détail d'un relief en béton.
Photo 5 : CCQ, France Rémillard
Toutes ces conditions sont essentielles pour l'obtention d'un produit impeccable. Toute imperfection, même peu perceptible au départ, diminuera l'espérance de vie du matériau, principalement sous l'effet des cycles de gel-dégel. Il peut s'agir :
En extérieur, l'eau est le principal facteur de dégradation des œuvres de béton. Son volume augmente d'environ 9% quand elle gèle. En s'infiltrant entre les éléments assemblés de l'œuvre, elle cause des éclatements, des fissures et même des déplacements qui s'aggravent à chaque cycle de gel-dégel.
L'eau n'étant généralement pas pure, elle peut laisser des taches sur son parcours. Le ruissellement venant d'un toit de cuivre finit par laisser des coulures vertes sur le béton. L'eau peut aussi causer des efflorescences et des concrétions oufavoriser la croissance de lichens.
Quand elle n'est pas canalisée, l'eau de ruissellement peut également provoquer des érosions locales. L'eau accélère, enfin, la corrosion des armatures de métal présentes dans la masse du béton.
Une œuvre appelée à être exposée à l'eau en permanence nécessite une très grande qualité d'exécution. Une fontaine, par exemple, doit être constituée d'un béton particulier et sa quincaillerie doit être à l'épreuve de la corrosion.
Les armatures en affleurement sont les premières à rouiller. Elles finissent par tacher et faire éclater le béton. La corrosion des armatures est la première cause des pertes par éclatement. Les garnitures de métal cuivreux ou ferrique tachent aussi le béton en surface.
Le ferrociment désigne à la fois une technique et un matériau. Le matériau est un composite de fer et de mortier. La technique de mise en œuvre consiste à utiliser un mortier dur et de bonne consistance en enduit sur un treillis métallique. Les armatures et les treillis de support du mortier sont habituellement en acier doux. Les éléments d'acier qui sont en affleurement sont les premiers à corroder.
Dispite philosophique (1972).
uvre en ferrociment de Lewis Pagé, devant le Grand Théâtre de Québec, après restauration.
Photo 6 : CCQ, Claude Payer
Dans un environnement humide en permanence, les mousses et les lichens prolifèrent. Ils ont peu d'effet sur le béton, mais ils modifient l'apparence des œuvres. On les trouve :
Ces agents biologiques sont aussi d'excellents indicateurs d'un problème d'égouttement sur le site de l'œuvre.
La pollution urbaine ou industrielle salit le béton, surtout dans les zones non lessivées par la pluie. En plus de modifier l'apparence des œuvres, les salissures retiennent les sels de déglaçage et les polluants gazeux. En s'accumulant, ceux-ci causent, à terme :
Comme toutes les autres œuvres d'art public, les sculptures de béton risquent de faire l'objet de vandalisme, qu'elles soient à l'intérieur ou à l'extérieur. Les dommages qu'elles subissent le plus souvent sont les graffitis.
Les bétons sont difficiles à nettoyer parce qu'ils sont poreux. Les décapants servant à effacer les graffitis font souvent pénétrer les colorants plus avant. Les bétons polymère sont aussi des cibles de choix pour les graffiteurs, vu leurs surfaces lisses, lustrées et colorées.
Le programme d'entretien des œuvres de béton doit tenir compte de cette complexité. Dans certains cas, il est aussi possible d'envisager l'application d'un anti-graffitis sacrificiel.
Situées dans des lieux passants, ces œuvres d'art public peuvent également subir des abrasions et des éraflures dues aux équipements utilisés pour la tonte du gazon, le déneigement ou le nettoyage.
S'assurer que la forme de l'œuvre, son socle et sa fondation permettent une évacuation des eaux de pluie. Pour chasser l'eau des surfaces horizontales, prévoir une légère pente vers le périmètre de l'œuvre. Éviter le recours aux trous d'égouttement car ils ont tendance à s'obstruer.
Au moment du coulage de l'œuvre, s'assurer :
Il faudra également :
En milieu extérieur, mieux vaut privilégier l'acier inoxydable de type 316 pour les armatures, surtout si elles sont en affleurement. Une alternative un peu moins coûteuse consiste à utiliser des armatures pré-enduites d'époxy.
Ces recommandations valent aussi pour les ancrages et les garnitures. Ceux-ci doivent idéalement être en acier inoxydable. L'acier finit par corroder à moyen terme, même s'il est galvanisé.
Avec un pH autour de 12, le béton est alcalin. Il passive les armatures qui se trouvent dans la masse, habituellement faites d'acier doux. Le pH du béton diminuant avec le temps, les armatures ne sont plus protégées. Elles sont attaquées par l'eau, les sels et les polluants.
Prévoir une aire de dégagement et de protection autour de l'œuvre pour :
De préférence choisir un site bien drainé, loin de la végétation envahissante et éloigné de la zone d'égouttement et des chutes de glace en provenance des toits environnants.
Voici les meilleurs moyens de bien installer une œuvre de béton :
Pour entretenir adéquatement les œuvres de béton, veiller à :
Afin de maintenir l'étanchéité des ouvrages et prévenir l'infiltration de l'eau, il faut sceller les joints à l'aide d'un mortier, colmater également les fissures, remplacer les pertes et refaire le jointoiement, au besoin.
Station du Chemin de crois (1919), œuvre de Delwaide et Goffin, au sanctuaire du Lac Bouchette. Les socles en béton de ces stations, refaits dans les années 1980, étaient fissurés et l'eau infiltrée avait causé des coulures, des efflorescences et des concrétions.
Photo 7 : CCQ, Isabelle Paradis
Afin de maintenir l'étanchéité des ouvrages et prévenir l'infiltration de l'eau, il faut sceller les joints à l'aide d'un mortier, colmater également les fissures, remplacer les pertes et refaire le jointoiement au besoin.
Au moment d'inspecter une œuvre de béton, il faut porter attention à :
La couleur naturelle du béton est plutôt pâle, dans les tons de gris-beige. Ceux-ci varient selon la nature du ciment et des granulats utilisés. Le béton peut toutefois être coloré.
La coloration la plus durable du béton consiste à intégrer de la couleur dansla masse. Decette façon, les usures, les éraflures et les pertes de matière sont moins visibles. Si les colorants sont des pigments minéraux stables, tels que des terres ou des ocres, la couleur ne s'altère pas au fil du temps et les graffitis peuvent être enlevés sans risque. Toutefois, à cause de la contrainte de concentration maximale des additifs, la couleur des bétons colorés dans la masse est rarement très saturée.
Une deuxième façon d'ajouter de la couleur à une œuvre en béton consiste à appliquer en surface un enduit coloré, soit de la teinture ou dela peinture. L'inconvénient de cette approche est que toute perte par abrasion, éraflure ou éclatement paraît davantage. De plus, ces enduits s'usent avec le temps, surtout dans les zones exposées aux frottements et à l'abrasion. Pour une meilleure tenue en milieu extérieur, un enduit poreux est préconisé :
Pour des couleurs plus affirmées, certains artistes ont recours aux bétons-polymères ou plus spécialement aux bétons modifiés aux résines (voir section Béton, photo 3). Le colorant est alors intégré au polymère constitutif de la couche extérieure. Plus coûteux, ces bétons ont une excellente résistance mécanique, mais ils résistent très mal aux solvants utilisés pour retirer les graffitis. Il faut donc s'attendre à devoir les retoucher ou les repeindre pour cacher les graffitis.
Quelques recommandations pour bien colorer le béton :
Il est préférable de consulter un restaurateur quand il s'agit de retirer un graffiti sur une surface peinte.
Comme les bétons auxquels ils sont apparentés, les mortiers sont des mélanges de ciment et/ou de chaux, d'eau et de granulats. Ces derniers sont fins et ne contiennent pas de cailloux. Comme le mortier est normalement appliqué àla truelle. Saconsistance doit donc être pâteuse.
En maçonnerie, le mortier sert à jointoyer des ouvrages de briques, de pierres ou de parpaings. Il sert aussi à appliquer des crépis sur les murs. Sa fonction est de rendre les ouvrages étanches.
Le mortier constitue la partie sacrificielle des ouvrages. Il doit donc être plus faible que les pierres, les briques ou les autres éléments assemblés.
Sur le marché, il existe plusieurs types de mortiers selon les usages. Ils diffèrent par leur composition. Le mortier peut être :
La taille des granulats contenus dans le mortier varie, de même que le ratio liant
substance liquide qui permet à l'artiste d'utiliser ses couleurs (huile, résine acrylique, colle, etc.).liant /granulats. Ce ratio est de 1 pour 4 et il est plus faible que dans le béton.
Il y a des mortiers spécifiques pour différentes applications tels les enduits et le jointoiement de différentes pierres ou de béton :
Quelques recommandations concernant les mortiers :
Date de mise à jour : 13 juin 2016